vendredi 19 juillet 2013

Sacred Cows



On adore. Bien cool, bien au calme, elle est la vraie reine de la ville (surtout a Benares). Elle va ou ca lui plait, a n'importe quel moment, mange ce qu'elle a envie, on la laisse tranquille. Vachement imposante parfois, squelettique de temps en temps, la bete ne ressemble en rien a ses cousines profanes de nos provinces wallonnes. Elle a une bosse derriere le cou, parfois grosse, parfois plus discrete, dont on sait pas trop d'ou elle sort ni quelle est sa fonction. La taille et l'orientation de ses cornes varient en fonction du lieu ou l'on se trouve en Inde, mais il y a toujours de quoi deranger son voisin qui boit un lassi a la banane, et pointer la chose de doigt et braillant " T'as vuuu les cornes de la vache !? ". Ca part dans tout les sens, c'est pointu ou epais, recourbe ou saillant, lisse ou raye. Un arsenal de guerre, qu'on voit rarement en action, mais des que les esprits s'echauffent, ou plutot les instincts, ca decoiffe. Comme pour le climat et la vegetation, on a l'impression que la Nature a fait les choses en gros. Tout est plus extreme que chez nous, ici, pas de demi-mesure. Quand il pleut, c'est tout le temps, c'est 6 mois, et 450 mm par mois. Quand il fait chaud, meme combat. Les deserts sont interminables, les arbres sont infiniment filandreux et colossaux. L'Inde, un festival d'exuberance.

La vache, donc, est un monument de tranquilite parmis tout ca. Elle s'avance, en solitaire ou avec quelques amies, au milieu du trafic (si elle a envie). A contre-sens peut-etre, ainsi soit-il. Parmis tout les bruits du vacarme urbain il y a surement quelques conducteurs que ca n'arrange pas et qui ont l'audace de lui claxonner a la gueule, mais ca passe inapercu. Ca ne la ferait pas bouger d'un iota, la vache, de toute facon. Si Elle veut se coucher, prise d'une fatigue soudaine, et que la bande blanche en plein plein centre d'une avenue lui parait un lieu de repos attrayant, personne n'ira lui faire la remarque, et c'est tant mieux. Le flot de vehicules, hommes, chevres, bestiaus non identifies et objets roulants difficiles a decrire se fendra en deux, contourne, vire brusquement a droite ou a gauche, accelere, et evitera la Reine de ces lieux. Un veritable enchantement fait que tout se passe bien, tout coulisse et se frole, mais presque jamais se collisionne.

Le scenario est different dans les petites ruelles, mais pas tant que ca. Deja, on a plus l'occasion de sentir sa presence, sentir avec le nez, cela est. Dans les dedales de Benares, la ou les meilleures coupe-gorges se trouvent, la ou les brigands nous fixent de leurs regards vitreux, borgnes et malfaisants, la ou les mendiants rampes par terre et vous attrape une cheville pour une piece (j'exagere, Maman!)... Bon, donc il y a plein de petites ruelles infinies ou on ne voit qu'a quelques metres devant soit car des tissus pendent, des gens trainent, et surtout parce qu'il y a des tournants, rien n'est droit dans ce pays. Ainsi, je peut etre certain que lorsque mon pied s'enfonce dans une bouse monumentale grande comme un gateau de mariage tout frais que je suis le premier a endommager, ou que je la repere a temps, c'est que la vache sacree n'est pas loin. Au virage suivant, je ne tarde pas a trouver la coupable qui tremousse son fier posterieur macule en se deplacant avec une lenteur...comment dire, exasperante. Un nouveau defi commence. Tres vite, ceux et celles qui sont candidats pour depasser notre chere vache s'alignent derriere elle et attendent une embrasure de porte ou un elargissement de la route. Comme une horloge a balancier, la queue de la vache bat la mesure, terminee par un plumet. Il faut bien calculer son coup, car ce fouet vivace et impertinent peut vous rapeller qui est la patronne ici, c'est vrai quoi a la fin.

Du matin au soir, donc, la vie de la vache est assez tranquille. Cela dit, faut pas se meprendre. Il arrive que ces bovides sympathiques s'emballent dans une baston.


Lieux de la scene: Hampi, un petit bled dans le Sud de l'Inde.
Moment: mi-Juillet, fin de soiree.
Degats: Grande frayeur psychologiquement inoubliable, quelques coups dans un rickshaw,un peu de poussiere soulevee...

La suite au prochain episode.

Oscar J de B.


1 commentaire:

  1. :-D C'est génial de vous lire, d'avoir de vos nouvelles !
    Profitez bien de cette expérience, elle aussi semble prendre les proportions de l'Inde ;-)

    Au plaisir de vous revoir au 42, un jour ou l'autre (soyez tranquilles, le 42 n'a pas changé, lui).

    Stef

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